Après la Seconde Guerre mondiale, géopolitique et géographie politique semblent connaître une période de discrédit en France et en Allemagne, justifié par la proximité de Karl Haushofer et de ses ...adeptes avec les nazis. Pourtant, de nombreux signes montrent que ces deux branches de la géographie humaine sont en fait traversées par des courants contradictoires dans les années 1950: le souvenir des errements passés, bien présent mais discuté, coexiste et rentre ainsi en tension avec la volonté de penser d’une part les mutations spatiales des sociétés européennes en reconstruction, d’autre part des relations internationales notamment marquées par la Guerre froide et les débuts de la construction européenne.
After World War Two, geopolitics and political geography were discredited in France and Germany due to the close links between Karl Haushofer’s school and the Nazi regime. However, a number of signs would suggest that these two branches of human geography were actually rife with contradictory tensions in the 1950s. The memory of past errors was very much alive despite ongoing debate. It coexisted alongside the determination to consider both the spatial mutations of European societies under reconstruction and international relationships, especially in the context of the Cold War and the first steps of the construction of Europe.
Lorsqu’en mai 1955, Wolfgang Hartke et Jean Dresch dialoguent publiquement à la Sorbonne de géographie appliquée, ce sont deux hommes mûrs, arrivés depuis peu au faîte de leurs carrières académiques. ...Hartke est alors déjà connu comme l’un des fondateurs de la nouvelle « géographie sociale », tandis que Dresch est renommé comme spécialiste de géographie physique et de l’Afrique du Nord, en particulier du Maroc. Leurs parcours sont à bien des égards comparables, et ce sont bien deux « patrons » de la géographie européenne qui se rencontrent dix ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale, et reviennent sur la question de la géographie politique. Pourtant, ce n’était pas du tout leur spécialité, et il s’agit d’essayer de comprendre ici les raisons qui ont présidé à cette discussion.
In May 1955, Wolfgang Hartke and Jean Dresch held a public debate on applied geography at the Sorbonne. They were both experienced men who had just reached the summit of their respective scholarly fields. Hartke had already made a name for himself as one of the founders of the new German “social geography”; whereas Dresch was a renowned specialist of physical geography and North Africa, particularly Morocco. In many ways, they shared similar career trajectories. Both leaders of European Geography, they met ten years after the end of the Second World War to discuss geopolitics, which was far beyond the realm of their research focus. This article will examine the reasons that explained the conference
