Le syndrome hyperéosinophilique essentiel (SHE) a été défini pour la première fois par Chusid et al., en 1975 1. Au fil du temps, cette entité s’est divisée en plusieurs sous-groupes en fonction de ...la physiopathologie 2. La recherche du phénotype T aberrant par cytométrie en flux (CMF) et la recherche de clonalité par PCR sont nécessaires au diagnostic du SHE variant lymphoïde (SHE-L) 3. La CMF utilise un panel composé en général d’une dizaine d’anticorps d’anti-cluster de différenciation (CD). Du fait de nombreux phénotypes T anormaux décrits dans la littérature, les panels d’anticorps dirigés contre les marqueurs de surface utilisés sont variables d’un laboratoire à l’autre, sans être standardisés.
Il s’agit d’une étude rétrospective, monocentrique menée de 2005 à 2016, incluant les patients diagnostiqués comme SHE idiopathique (SHE-I) et SHE-L. Les données cliniques, biologiques ainsi que la réponse au traitement ont été recueillis. Les résultats de la CMF et de la clonalité ont été relus par 2 investigateurs. L’hypothèse était la présence du variant lymphoïde parmi les SHE-I. L’objectif était d’évaluer l’apport diagnostique de la CMF à l’aide d’un seul panel d’anticorps d’anti-CD utilisé, dans la détection des phénotypes T aberrants définissant le SHE-L. Les objectifs secondaires étaient d’évaluer la place de la clonalité T et de la pertinence des examens complémentaires autres dans le diagnostic du SHE-L.
Sur une période de 10 ans, les dossiers de 518 patients ayant consulté pour une hyperéosinophilie dans les services d’hématologie et de médecine interne du C.H.U. de Limoges ont été analysés. Seuls 20 patients au diagnostic de SHE-I (n=12) et SHE-L (n=8) ont été inclus. La comparaison des deux groupes SHE-I et SHE-L, n’a pas mis en évidence de différence clinique, biologique, ou réponse thérapeutique. L’apparition du phénotype aberrant a été notée au cours du suivi chez deux patients. La comparaison des groupes traité versus non traité a mis en évidence que les patients traités étaient plus altérés (p=0,03), avec une hyperéosinophilie plus marquée (p=0,029). Les examens invasifs tels que le myelogramme et la biopsie ostéo-médullaire étaient soit normaux, soit mettaient en évidence une hyperéosinophilie sans dystrophie ni autre anomalie, n’apportant donc aucune contribution diagnostique dans le SHE-L.
En dehors du phénotype aberrant et de la clonalité, le groupe SHE-L est habituellement caractérisé par des manifestations cutanées associées à un taux élevé d’IgE, une hypergammaglobulinémie polyclonale et une importante cortico-sensibilité. La comparaison du groupe SHE-L et du SHE-I a abouti à 2 profils identiques sans différence en termes du terrain, de la présentation clinico-biologique et de la réponse au traitement. Ce travail permet d’émettre plusieurs hypothèses sur l’imperfection de la CMF : il est possible qu’un seul panel ne soit pas à lui seul suffisant pour diagnostiquer avec certitude tous les phénotypes aberrants. L’analyse de la CMF peut s’avérer compliquée dans certains cas rendant ainsi la coopération biologiste–clinicien indispensable. Le pourcentage des lymphocytes T ayant un phénotype T aberrant est arbitraire et non standardisé.
La présence des SHE-L non détectés à l’aide d’un seul panel d’anti-CD, parmi les SHE-I semble plausible. Afin de vérifier cette hypothèse, il serait intéressant de mener une étude comparative entre le panel classique utilisé par le laboratoire et un autre, plus étendu, pour les patients au profil clinique du SHE-L avec une altération de l’état général et n’ayant pas de phénotype aberrant dépisté par le panel classique. Pour cela, il est important de définir les CD les plus pertinents d’une part du fait du coût des anticorps et d’autre part pour essayer de déterminer un maximum de phénotypes aberrants. L’apparition du phénotype T aberrant au cours du suivi suggère un continuum entre ces deux entités.
Recurrent FUO (fever of unknown origin) is a rare subtype of FUO for which diagnostic procedures are ill-defined and outcome data are lacking.
We performed a retrospective multicentre study of ...patients with recurrent FUO between 1995 and 2018. By multivariate analysis, we identified epidemiological, clinical and prognostic variables independently associated with final diagnosis and mortality.
Of 170 patients, 74 (44%) had a final diagnosis. Being ≥ 65 years of age (OR = 5.2; p < 0.001), contributory history (OR = 10.4; p < 0.001), and abnormal clinical examination (OR = 4.0; p = 0.015) independently increased the likelihood of reaching a diagnosis, whereas lymph node and/or spleen enlargement decreased it (OR = 0.2; p = 0.004). The overall prognosis was good; 58% of patients recovered (70% of those with a diagnosis). Twelve (7%) patients died; patients without a diagnosis had a fatality rate of 2%. Being ≥ 65 years of age (OR = 41.3; p < 0.001) and presence of skin signs (OR = 9.5; p = 0.005) significantly increased the risk of death.
This study extends the known yield of recurrent FUO and highlights the importance of repeated complete clinical examinations to discover potential diagnostic clues during follow-up. Moreover, their overall prognosis is excellent.
La maladie des agglutinines froides (MAF) est une anémie hémolytique auto-immune causée par des anticorps de type IgM réagissant aux hématies à une température de 3–4°C. Cette maladie peut se ...déclarer de manière primaire ou secondaire ; dans ce dernier cas, elle est déclenchée par une infection, une maladie auto-immune ou un cancer. Nous rapportons le cas d’une MAF de présentation atypique. Il s’agit d’une patiente de 48 ans avec antécédents de dermatite atopique traitée ponctuellement par dermocorticoïdes et endométriose avec traitement chirurgical puis médical (nomégestrol). Elle présente depuis 6 ans un syndrome de Raynaud initialement limité aux doigts, au nez et aux oreilles. On note l’apparition d’un livedo à grandes mailles touchant le visage et les quatre membres, ainsi que des plaques violacées apparaissant lors de l’exposition au froid. L’atteinte faciale est responsable d’une gêne esthétique majeure pour la patiente. Ce tableau cutané s’accompagne de paresthésies des quatre membres survenant également à l’exposition au froid, ainsi que d’arthralgies d’horaire mécanique au niveau des genoux, des interphalangiennes proximales/distales et d’un syndrome sec buccal. Les radiographies des articulations douloureuses sont normales, l’électromyogramme sans particularités, la capillaroscopie montre des capillaires dilatés avec méga capillaires. Le bilan biologique standard est normal. La biopsie cutanée réalisée sur la cuisse au niveau du livedo ne montrait aucune anomalie et, en particulier, aucun signe de vascularite, avec une immunofluorescence négative. Devant la symptomatologie de cyanose avec livedo et phénomène de Raynaud, une recherche d’agglutinines froides est effectuée et revient positive. Le frottis sanguin retrouvait des hématies en rouleaux, avec un test de Coombs positif en C3. Ces manifestations cutanées douloureuses sont donc rattachées à une maladie des agglutines froides, initialement sans anémie associée, sans marqueurs biologiques d’hémolyse. Un bilan étiologique est réalisé pour distinguer une MAF primaire d’une secondaire. L’électrophorèse des protéines sériques retrouve un pic minime IgM kappa. Le dosage pondéral des immunoglobulines ne retrouve qu’une légère augmentation des IgA, il n’y a pas de désorganisation des chaînes légères, et les populations lymphocytaires sont équilibrées. Les sérologies VIH et VHC sont négatives, la patiente est immunisée contre l’hépatite B et on note une infection ancienne à l’EBV. La sérologie Mycoplasma pneumoniae est également négative. Sur le plan auto-immun, les facteurs antinucléaires sont augmentés à 1/160 mais sans spécificité. Le complément n’est pas consommé, la cryoglobulinemie est négative. Le TEP scan montre uniquement une fixation ganglionnaire axillaire droite à quelques jours d’un vaccin COVID dans le bras droit. Devant l’aggravation secondaire des signes cutanés, et une anémie à 10g/dL normocytaire régénérative avec haptoglobine à 0,43g/L, la patiente a été traitée avec deux cures de rituximab j1 puis j15 permettant une nette amélioration clinicobiologique.
La MAF peut souvent s’accompagner d’un phénomène de Raynaud ou de symptômes à type d’acrocyanose sur les doigts, orteils ou les oreilles, mais il est beaucoup plus rarement décrit un phénomène de Raynaud du visage comme celui-ci. Dans de rares cas, on peut observer un livedo racemosa sur l’ensemble du corps, mais nous rapportons ici une autre présentation clinique avec une cyanose des quatre membres et du visage survenant immédiatement après l’exposition au froid. De plus, il est étonnant de constater une présentation clinique aussi bruyante malgré l’absence initiale d’anémie et d’hémolyse à la biologie. Cette patiente nécessitera une surveillance accrue dans l’avenir pour ne pas méconnaître une cause secondaire.
La polymyosite est une myopathie inflammatoire auto-immune rare, s’associant à un cancer dans 15 à 20 % des cas. L’atteinte cardiaque, probablement sous-estimée pour de nombreux patients, grève le ...pronostic et peut se manifester par des anomalies électriques, une vascularite coronaire, une myocardite inflammatoire, une péricardite ou un prolapsus mitral. Il est souvent difficile d’attribuer une atteinte cardiaque sur la simple biologie (Créatine Kinase CPK ou troponine), souvent le reflet de l’atteinte myositique globale. Nous rapportons ici le cas d’une patiente présentant une myosite auto-immune accompagnée d’une « fausse » élévation de la troponine.
Il s’agit d’une patiente de 58ans souffrant d’une polyarthrite rhumatoïde anti-CCP positive, diagnostiquée 4ans auparavant, traitée par corticoïdes et methotrexate puis abatacept. Depuis plusieurs mois, sont apparus une asthénie, un amaigrissement de 4kg et une faiblesse musculaire des ceintures confirmée par électromyogramme (syndrome myogène). La biologie montrait : CPK à 1884UI/L, ASAT à 68UI/L, troponine ultra sensible (US) à 1088ng/L, BNP<50 ng/L, des anti-Mi2 positifs et des facteurs rhumatoïdes à 3695UI/mL.
La biopsie musculaire est évocatrice d’une myopathie inflammatoire auto-immune en faveur d’une myosite de chevauchement. Le tissu musculaire très altéré, est infiltré par de nombreuses cellules inflammatoires mononucléées, à prédominance endomysial. Certaines fibres sont en voie de nécrose et d’autres sont en voie de myophagocytose. Il n’a pas été vu de granulome, d’atrophie périfasciculaire, ni de franche augmentation du tissu conjonctif. Par ailleurs une origine néoplasique est éliminée.
Sur le versant cardiaque, l’élévation importante de la troponine US (>1000ng/ml) restait stable, contrastant avec une clinique et des explorations cardiaques normales (holter ECG, échographie, IRM cardiaque et coroscanner), faisant évoquer la possibilité d’une interférence sur le dosage de la troponine US avec la présence d’anticors hétérophiles ou anticorps humain anti-murins. Un dosage de la troponine Ic reviendra normal (<0,01μg/L) confirmant cette hypothèse.
L’hypothèse est la présence d’anticorps hétérophile anti-murins possiblement en lien avec la prise d’abatacept, composé d’une protéine de fusion murine, connue pour être responsable d’interférence du dosage de la troponine 1. Le principe de dosage de la troponine consiste à apporter un anticorps anti-troponine qui forme un pont avec les différentes formes de la troponine et émet une lumière détectée par l’automate 2. De ce fait, tout patient possédant des anticorps capables de reconnaître les anticorps utilisés dans ces techniques de type sandwich pourra présenter une élévation apparente de la concentration de troponine.
Certaines trousses de dosage utilisent des anticorps anti-troponine de type murin. L’utilisation thérapeutique d’anticorps monoclonaux murins est à l’origine d’une immunisation, conduisant à la formation d’anticorps humains anti-murins (HAMA) : ces derniers pourront se fixer sur la région idiotypique des anticorps utilisés dans la réaction de dosage et conduire à l’existence de faux positifs. De même, le facteur rhumatoïde est une immunoglobuline spécifique de la partie Fc des molécules d’IgG : ces facteurs pourront former des ponts avec les anticorps utilisés dans la réaction de dosage et conduire là encore à l’existence de faux positifs. L’incidence fréquente des interférences dues aux HAMA et au facteur rhumatoïde a conduit les fabricants à ajouter dans le milieu réactionnel des immunoglobulines bloquantes pour neutraliser les HAMA et le facteur rhumatoïde. Cependant, l’interférence peut se produire si la quantité d’agents bloquants est insuffisante par rapport à la quantité d’anticorps initialement présente dans le sérum du patient.
L’atteinte cardiaque dans les myosites est importante pour le pronostic. Elle est présente pour 10 à 15 % des patients présentant des myosites, à type trouble de conduction, trouble du rythme ou de la repolarisation, ou plus rarement d’une vascularite coronarienne ou une cardiomyopathie inflammatoire responsable d’une insuffisance cardiaque congestive. D’où l’intérêt d’effectuer des explorations cardiaques avec à minima ECG, Holter-ECG, échographie voire scintigraphie ou IRM cardiaque.
Des troponines US élevées au cours des myosites doit faire évoquer des interférences dans ce contexte auto-immun. Nous préconisons dans ce cas, après réalisation d’un bilan cardiaque exhaustif, le dosage de la troponine Ic.
La sclérodermie localisée ou morphée, est une connectivite caractérisée par une sclérose de la peau pouvant s’étendre aux tissus sous-cutanés avec différentes expressions cliniques, dont la forme ...linéaire est majoritaire. Depuis la pandémie liée au SARS-CoV-2 de 2020 et la vaccination de masse qui s’en est suivie, il a été rapporté plusieurs cas de sclérodermies localisées dans les suites d’une vaccination ou d’une infection liée au COVID-19 1. Nous rapportons ici un cas de morphée monomélique secondaire à la vaccination.
Il s’agit d’une patiente de 17 ans, sans antécédent, présentant une polyarthralgie d’horaire mixte (mains, coudes, épaules et chevilles), survenant 2 semaines après une première dose vaccinale anti-COVID-19 type ARN messager.
Le symptôme princeps était un œdème bilatéral des mains, des avant-bras et des chevilles s’accompagnant de paresthésies, touchant tous les doigts avec sensation de perte de force et de préhension. L’état général était conservé. Rapidement est apparue une sensation d’épaississement cutané douloureux en regard des articulations (poignet, cheville, genou, coudes) et des avants bras. Le testing objectivait une perte de force motrice (score MRC à 4/5), avec limitation des mobilités articulaires. On ne retrouvait pas d’atteinte digestive, respiratoire, cardiaque, rénale ni ORL par ailleurs. La symptomatologie s’aggrave par la suite, avec une majoration des oedèmes et des douleurs, avec perte de force de préhension complète et flessum palmaire liée à la progression de l’infiltration scléreux cutané. Une auto-médication par anti-inflammatoires non stéroïdiens s’est révélée inefficace.
Le bilan biologique notamment auto-immun (dot sclérodermie), la ponction lombaire, l’électromyogramme et les IRM cérébrale et médullaire ne retrouvaient aucun élément pathologique. L’IRM des mains objectivait une synovite des tendons fléchisseurs. L’IRM musculaire corps entier montrait un épaississement avec rehaussement des fascias des gastrocnémiens, fibulaires et tibial antérieur. La biopsie musculaire objectivait un infiltrat inflammatoire lymphoplasmocytaire du derme, de l’hypoderme et du fascia avec une fibrose du fascia, compatible avec une sclérodermie profonde.
Après concertation multidisciplinaire, le diagnostic de morphée profonde post-vaccinale est retenu et un traitement par cortancyl (1mg/kg) associé à du méthotrexate (20mg/semaine) est entrepris.
La symptomatologie s’améliore rapidement avec disparition du flessum palmaire, un assouplissement cutané. Les arthralgies sont encore présentes avec 6 mois de recul, mais soulagées par des antalgiques de palier 1.
La vaccination anti-COVID-19, tout comme d’autres vaccins, a souvent été incriminé dans le cadre d’authentiques artérites à cellules géantes ou même de pseudo-polyarthrite rhizomélique 2,3. Les cas de sclérodermies systémiques ou localisées post-vaccinales sont plus rares. Nous préconisons une attention particulière de tout patient après une vaccination, ce qui permettrait probablement un meilleur dépistage des pathologies dysimmunitaires post-vaccinales et donc une prise en charge plus précoce.
L’artérite à cellules géantes (ACG) est une vascularite des gros vaisseaux dont il existe des formes post-vaccinales faisant essentiellement suite à la vaccination anti-grippale. Nous présentons ici ...le premier cas décrit d’artérite à cellules géantes post-vaccination anti-pneumococcique.
Nous rapportons ici le cas d’une patiente de 71 ans qui présentait des céphalées occipitales intenses, d’irradiation holocrânienne, une hyperesthésie du cuir chevelu et une carotidodynie bilatérale, sans symptomatologie rhizomélique ou ophtalmologique, apparues de façon brutale à 15jours d’une vaccination par PNEUMOVAX. Une réaction au point d’injection était survenue dans les suites immédiates de cette vaccination, une résolution spontanée ayant été obtenue en 4jours. Son principal antécédent était un cancer colorectal en rémission clinique et métabolique après sigmoïdectomie, chimiothérapie adjuvante et métastasectomies hépatique et pulmonaire. À l’examen, les pouls temporaux étaient très peu perceptibles, sans caractère induré. Le reste de l’examen clinique, notamment neurologique et ophtalmologique, était sans anomalie. En regard, la biologie relevait une CRP à 50mg/L, un fibrinogène à 5,6g/L et un profil inflammatoire à l’électrophorèse des protéines. La numération formule sanguine et la VS étaient normales, la sérologie SAPL était négative ; l’écho-Doppler des troncs supra aortiques ne retrouvait pas d’hyperhémie pariétale, contrastant avec l’hypermétabolisme intense et bilatéral des artères sous-clavières axillaires, des carotides, de l’aorte abdominale et de la bifurcation iliaque sur le TEP-scanner. Le fond d’œil était sans anomalie. Finalement, la biopsie d’artère temporale droite confirmait l’aspect de panartérite inflammatoire giganto-cellulaire. Le diagnostic d’ACG non compliquée a ainsi été posé, justifiant une corticothérapie à 0,7mg/kg/jour, soit 50mg/jour. Une corticodépendance à 30mg/jour a requis l’adjonction de tocilizumab sous-cutané.
Il s’agit du premier cas d’ACG décrit dans les suites de la vaccination anti-pneumococcique. À ce jour, les vaccinations anti-grippale et anti-SARS-CoV2 sont les deux plus pourvoyeuses d’ACG induites 1,2. Les bases de pharmacovigilance (dont Vigibase) décrivent des cas de vascularites suite à la vaccination contre le Streptococcus pneumoniae, au premier desquelles la maladie de Kawasaki ; des cas de pseudo-polyarthrite rhizomélique (PPR) ont également été rapportés sur ces bases de données 3.
Parmi les cas de vascularites en lien avec la vaccination antipneumococcique, il s’agit ici du premier cas d’ACG décrit dans la littérature. La recherche d’une évolution des cas de PPR rapportés dans les bases de pharmacovigilance vers une ACG permettrait de lever une éventuelle sous-estimation des formes post-vaccination anti-pneumococcique.
L’artérite à cellules géantes (ACG) est une vascularite des vaisseaux de gros et moyen calibre, avec une prédilection pour les artères carotides externes. L’urgence vient du risque de cécité ...définitive dans 10 à 20 % des cas, avec un risque élevé d’atteinte bilatérale dans 4 à 54 % des cas, souvent asynchrone. Notre étude a pour but d’identifier les éventuels critères prédictifs d’ischémie visuelle permanente (IVP) bilatérale au cours de l’ACG.
Il s’agissait d’une étude observationnelle rétrospective monocentrique. Les données démographiques, cliniques, biologiques, et évolutives sont issues de la cohorte prospective historique de patients atteints d’ACG d’un service de médecine interne français entre 2005 et 2022. Un complément d’information a été fait de façon rétrospective à partir du dossier clinique et ophtalmologique de chaque patient. L’atteinte visuelle permanente était définie par l’association d’une baisse d’acuité visuelle avec une anomalie objectivée par un ophtalmologue soit au fond d’œil, à l’analyse du champ visuel, à la tomographie par cohérence optique papillaire ou à l’angiographie.
Parmi les 368 patients inclus, 17 (5 %) ont présenté une IVP bilatérale, 11 d’emblée avant le traitement et 6 avec une IVP unilatérale qui a bilatéralisé en début de traitement. Ils avaient tous une neuropathie optique ischémique antérieure aiguë (NOIAA).
En comparant la cohorte entière avec les patients atteints d’IVP bilatérale, ces derniers étaient significativement plus âgés (79 vs 74 ans, p<0,01), présentaient moins d’amaigrissement (0 % vs 37 %, p<0,01), davantage de douleurs maxillaires (65 % vs 39 %, p=0,04), de dysphagie (35 % vs 14 %, p=0,03), et d’anomalie palpatoire de l’artère temporale (94 % vs 61 %, p<0,01). Aucun de ces 17 patients ne présentaient d’aortite au diagnostic (0 % vs 21 %, p=0,03). Aucun traitement d’épargne cortisonique n’a été débuté au début de l’atteinte visuelle et leur utilisation par la suite n’est pas significativement différente entre ces patients et le reste de la cohorte (29 % dans le groupe IVP bilatérale vs 20 %, p=0,36).
Le délai de prise en charge entre les patients avec IVP ayant bilatéralisé sous traitement (n=6) et ceux ayant une IVP restant unilatérale (n=50) n’était pas significativement différent (6,1 vs 8,5 jours, p=0,84). Le délai moyen de bilatéralisation sous traitement était de 3,3 jours après le début du traitement. Les patients ayant bilatéralisé sous traitement, en comparaison avec ceux ayant une IVP restant unilatérale, présentaient une CRP plus élevée (122 vs 72mg/L, p=0,04) et étaient plus souvent diabétiques au diagnostic (50 % vs 10 % ; p=0,03). Le délai entre l’introduction de la corticothérapie et la première atteinte visuelle était non significativement différent entre les deux groupes (4,2 vs 8,5 jours ; p=0,94).
Tous les patients ayant bilatéralisé sous traitement étaient traités par bolus de méthylprednisolone lors de la première atteinte visuelle : 3 patients ont bilatéralisé malgré des bolus de 500mg par jour (un patient à j1, deux patients à j2) et 3 patients avec des bolus de 300mg par jour (respectivement à j2, j5 et j8). Aucun patient ayant bilatéralisé ne s’est améliorés sur l’atteinte visuelle de manière subjective.
L’IVP bilatérale est une des complications les plus redoutées de l’ACG, source d’un handicap fonctionnelle majeure pour les patients. Le traitement par bolus de glucocorticoïdes n’a pas empêché la bilatéralisation pour 6 patients dans notre étude. De nouvelles thérapies sont nécessaires afin de prévenir cette complication gravissime notamment pour les patients ayant une atteinte visuelle unilatérale au cours de l’ACG.
Le diagnostic de certitude d’artérite à cellules géantes (ACG) repose sur une preuve histologique obtenue par étude du tissu artériel. La biopsie d’artère temporale (BAT) est le geste privilégié en ...cas de suspicion d’ACG. Sa sensibilité est variable, dépendante de divers facteurs : présentation clinique, résultats doppler de l’artère temporale, technique chirurgicale. L’objectif de ce travail était de mettre en évidence les éléments clinicobiologiques, Doppler et chirurgicaux les plus prédictifs d’une BAT positive en cas de suspicion d’ACG.
Les patients avec un diagnostic final d’ACG selon les critères ACR étaient issus d’une cohorte monocentrique. Le recueil des données cliniques, biologiques, évolutives était effectué de façon prospective selon un cahier standardisé. Seuls les patients avec un examen clinique détaillé, et ayant eu une biopsie d’artère temporale ont été inclus.
Sur une période allant de 1976 à 2022, 419 patients ACG ont été inclus (62 % de femmes, âge moyen de 75±8 ans). Les signes cliniques rapportés étaient : céphalées (84 %), symptômes bucco-pharyngés (71 %), palpation de l’artère temporale anormale (70 %) induration 53 %, absence/diminution de battement 51 %, douleur 23 %, nodules 12 %, inflammation cutanée 9 %, hyperesthésie du cuir chevelu (49 %), claudication à la mastication (CM) (36 %), signes visuels (36 %) amaurose fugace 25 %, permanente 17 %, bilatérale 5 %, pseudo-polyarthrite rhizomélique (PPR) (28 %), aortite à l’imagerie (11 %). Les taux moyens des marqueurs biologiques étaient VS 85±28mm, CRP 96±62mg/L, fibrinogène 6,9±1,7g/L, plaquettes 438±158G/L. Lorsqu’elle était réalisée, l’échographie Doppler temporale montrait un signe du halo dans 48 % des cas. La BAT était positive pour 75 % des patients avec une longueur moyenne de 25±15mm.
Les patients avec une BAT positive étaient significativement plus âgés (p=0,0151), avaient plus souvent une palpation de l’artère temporale anormale (p<0,0001), de CM (p<0,0001), des taux de plaquettes et CRP plus élevés (p<0,01), un Doppler temporal plus souvent positif (p=0,0001), une BAT plus longue (p=0,0023), et moins souvent une PPR associée (p=0,0014).
En analyse multivariée les critères associés à une BAT positive étaient : taille de BAT supérieure à 20mm (OR=3,7, IC95 %=1,9–7,4, p=0,0001), la présence d’une CM (OR=3,4, IC95 %=1,6–7,6, p=0,0019), un Doppler temporal positif (OR=3,4, IC95 %=1,7–7,3, p=0,0008), une induration de l’artère temporale à la palpation (OR=1,8, IC95 %=0,9–3,7, p=0,0782), l’absence de PPR (présence : OR=0,5, IC95 %=0,3–1,0, p=0,0019). Les performances du modèle sont : sensibilité 93 %, spécificité 31 %, valeur prédictive positive 80 %, négative 61 %.
Certaines caractéristiques initiales (induration de l’artère temporale, claudication masticatoire et absence de PPR) sont prédictives du résultat positif de la BAT en cas de suspicion d’ACG. Le résultat du doppler temporal ainsi que la taille du fragment biopsié ont également une importance prédictive.
Les médecines alternatives et complémentaires (MAC) évoluent en parallèle d’une médecine dite conventionnelle, soumise à une validation scientifique. Les maladies auto-immunes (MAI) sont responsables ...d’atteintes multiples, fonctionnelles et organiques et les traitements médicamenteux sont parfois insuffisants sur les plaintes subjectives (fatigue, douleurs) sources d’une altération de la qualité de vie. Ces patients, plus enclin au spirituel et plus souvent anxieux et/ou dépressifs, réunissent des conditions favorables à l’utilisation de MAC. Mais si certaines sont admises pour leurs bienfaits, d’autres pourraient être à risques d’erreurs diagnostiques et thérapeutiques. Il manque par ailleurs d’études d’efficacité validées scientifiquement ou de données de vie réelle. L’objectif de cette étude était d’évaluer la prévalence d’utilisation des MAC chez des patients suivis pour une MAI et de décrire ces pratiques, les caractéristiques des patients et les facteurs d’association.
Cette étude observationnelle prospective a été réalisée dans un service de médecine interne entre 2019 et 2021. Les patients suivis pour un lupus érythémateux systémique (LES), un syndrome de Sjögren primitif (SSp), ou une sclérodermie systémique (SS) ont été inclus. Les données étaient recueillies à l’aide d’un questionnaire rempli par le médecin et le patient, qui évaluait les caractéristiques sociodémographiques et de la maladie, la pratique ou non de MAC et en cas de réponse positive les modalités d’utilisation et leur efficacité à l’aide de scores de qualité de vie.
Cent vingt et un patients ont été inclus (LES n=47, SSp n=31, SS n=43), composés majoritairement de femmes (87 %), avec un âge moyen de 56 ans (±14 ans), d’origine occidentale (88 %), vivant en milieu rural (67 %). Trente-cinq pour cent des patients étaient sous corticothérapie, 26 % sous immunosuppresseurs/biothérapies, 37 % sous psychotropes et 62 % sous antalgiques de paliers I à III. Le score de qualité de vie SF-36 était de 42/100 en moyenne et le score HAD montraient la présence d’anxiété mais pas de dépression (moyenne respectivement à 8,5 et 6).
La prévalence d’utilisation des MAC était de 55 % dans la population étudiée (LES 53 %, SSp 61 %, SS 53 %). On comptabilisait au total 186 pratiques de MAC. Les patients recouraient principalement à des pratiques encadrées comme l’ostéopathie (22 %), l’homéopathie (9 %), et l’acupuncture (7 %) mais également des traditions locales (guérisseurs, magnétiseurs) (11 %), des techniques de relaxation (sophrologie, méditation, hypnothérapie) (13 %), relation corps-esprit (qi-gong, yoga, shiatsu) (9 %), et de manipulation (réflexologie, massothérapie, chiropraxie, étiopathie) (8 %), l’usage de plantes et remèdes naturels (balnéothérapie, naturopathie, aromathérapie, phytothérapie, luminothérapie) (10 %), ou des médecines orientales (3 %). Les MAC étaient pratiquées régulièrement, plusieurs fois par semaine (16 %) ou par mois (14 %) depuis plus d’un an dans 39 % des cas.
L’intérêt de recours aux MAC était de lutter contre la douleur (61 %) et la fatigue (34 %), rechercher le bien-être (41 %), éviter des traitements supplémentaires (61 %) voire de rejeter la médecine conventionnelle (47 %). Elles étaient rarement proposées par un médecin (17 %). Les patients rapportaient une amélioration physique et/ou mentale dans 65 % des cas.
En analyse univariée, la pratique des MAC n’était statistiquement pas associée à l’âge, le sexe, le milieu de vie, la profession, les traitements ou les scores d’anxiété et dépression. Les patients sous traitement antidépresseurs pratiquaient statistiquement plus de MAC. En analyse multivariée, les variables prédictives d’utilisation de MAC étaient l’origine occidentale, un score SF-36 physique bas et une durée d’évolution longue de la maladie (respectivement p=0,01, p=0,03, p=0,06).
Il s’agit de la première étude faisant un état des lieux descriptif de l’utilisation des MAC dans un groupe de patients atteints de connectivites. Les résultats mettent en évidence l’étendue de ces pratiques, permettent de cibler les populations d’intérêt et leurs besoins, et d’attester que des études prospectives à plus grande échelle semblent nécessaires. L’enjeu actuel est d’enrichir la médecine conventionnelle de pratiques alternatives et complémentaires efficaces et sécurisées, à l’aide de programmes individuels et collectifs afin de tendre vers une médecine intégrative.