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Celotno besedilo
  • Jean Mayerat

    12/1991
    Video Recording

    Concilier économie et écologie, réconcilier le professionnel de la terre et la nature, par l'entomologie. Ou encore, dans l'itinéraire de Mario Baggiolini, produire mieux, donc apprendre à composer. C'est ainsi que ce Tessinois, né en 1914 à Chiasso, deviendra un précurseur de la production intégrée. Portrait d'un homme qui aime la terre, ses fruits, la pluridisciplinarité, l'harmonie, qui sait quitter l'insectarium pour le verger où la nature profonde manifeste son existence. 00:00:00 – 00:00:11 (Séquence 0) : Générique de début du Plans-Fixes consacré à Mario Baggiolini, entomologiste, et tourné à Nyon le 23 décembre 1991. L'interlocuteur est Philippe Golay. 00:00:11 – 00:00:56 (Séquence 1) : Pour connaître un individu, Mario Baggiolini estime que le temps d’une vie suffit mais pour connaître un insecte faisant partie de l’univers, le temps d’une vie ne suffit pas. Il y a tant de choses à découvrir qu’il n’est pas possible pour un scientifique de découvrir quelque chose d’une manière définitive sur le temps d’une vie. 00:00:56 – 00:02:56 (Séquence 2) : On demande à Mario Baggiolini comment va la planète. Selon lui, elle ne va pas très bien. Il évoque entre autres la destruction des forêts et les trous dans la couche d’ozone. Ce qui le préoccupe davantage est la corrélation négative entre le progrès, l’avancement de la science et ce que l’homme fait de ces découvertes et de la richesse qu’il a entre les mains. Mario Baggiolini estime que l’homme utilise très mal les richesses que la terre lui offre. Il croit qu’une meilleure vulgarisation scientifique pourrait permettre à tout un chacun de mieux participer à la gestion des ressources naturelles car le devenir de l’homme est lié à sa connaissance et à son ouverture. Dans sa pratique professionnelle et avec son équipe de Changins, il a vraiment essayé de sensibiliser les gens et de leur communiquer un message qui reste d’actualité. Il est optimiste car le progrès des connaissances avance. 00:02:57 – 00:03:42 (Séquence 3) : Mario Baggiolini se sent appartenir profondément à cette terre car il vient d’une famille de paysans des collines du lac Majeur, près de Chiasso au Tessin. Il est devenu ensuite technicien agricole car il cherchait dans cette nature quelque chose qui le passionnait. Il a donc travaillé la terre, puis a travaillé avec les cultivateurs, toujours en contact avec cet univers terrien dans lequel il se sent inséré. 00:03:43 – 00:05:49 (Séquence 4) : Mario Baggiolini est né le 4 décembre 1914 à Chiasso, dans l’extrême Sud de la Suisse, où il a ensuite vécu jusqu’à l’âge de six ans. Il a peu de souvenirs de son enfance, il se souvient d’une maisonnette qui lui semblait immense et qui, lorsqu’il l’a retrouvée adulte, lui a semblé minuscule. Il a perdu son père à l’âge de quatre ans, c’était en 1919 à la fin de la première guerre mondiale. Sa mère, d’origine italienne, est restée quelques années au Tessin puis est finalement retournée avec ses enfants en Italie. Mario avait alors six ou sept ans. La famille de sa mère avait un petit domaine sur les collines du Lac Majeur près de Luino, le terrain était sec mais il permettait de nourrir toute la famille. Ce nouvel environnement a saisi Mario avec ses prairies sèches et ses forêts de châtaigniers et a suscité en lui la vocation de travailler en lien avec la terre. Mario Baggiolini s’est donc inscrit aux cours d’un institut d’agriculture qui se trouvait près de Brescia. 00:05:51 – 00:06:18 (Séquence 5) : Mario Baggiolini a découvert dans les collines de son enfance beaucoup de parfums, de couleurs et de bestioles de toutes sortes. Il se souvient bien des parfums de la cuisine aussi et c’est un souvenir agréable. On ne mangeait pas de la viande tous les jours à cette époque. Mario Baggiolini évoque un souvenir qui reste encore vivant, celui du bouilli, du bouillon et du risotto fait avec ce bouillon. Le risotto est resté le plat préféré de Mario. 00:06:20 – 00:07:23 (Séquence 6) : Mario Baggiolini entre en 1929 à l’institut technique d’agriculture de Brescia. C’est aussi la découverte du monde au delà de la maison familiale. Mario Baggiolini compare le domaine familial rudimentaire, presque montagnard, et très pauvre dont il venait à la campagne opulente des environs de Brescia. Mario estime que la préparation à la vie agricole n’était pas tout à fait adaptée à la terre dont il venait. En effet, lorsqu’il est retourné au domaine familial, il avait beaucoup de notions théoriques et une grande admiration pour ce qu’on pouvait faire dans l’agriculture, mais il n’était pas possible de les appliquer sur son petit domaine sans eau. 00:07:25 – 00:08:09 (Séquence 7) : En 1932, Mario Baggiolini part à Luino se spécialiser en arboriculture. Pour compléter les revenus et survivre, Mario faisait sur son domaine un peu d’arboriculture et soignait aussi des vergers sur les domaines environnants. Durant ces années de crise, il lui fallait augmenter ses revenus car il souhaitait fonder une famille. Il a donc trouvé un travail de dessinateur industriel dans une maison d’installations frigorifiques. 00:08:12 – 00:09:43 (Séquence 8) : Mario Baggiolini compare les variétés de pommes qu’il cultivait étant jeune, comme la reinette du Canada et des vieilles variétés locales, à celles cultivées aujourd’hui. Le goût des pommes a évolué. Le goût de la pomme acide de sa jeunesse n’est plus le goût du jour, il préfère une pomme qui a de la douceur, un peu d’acidité, mais surtout du goût. Mario Baggiolini montre une pomme golden, pomme reine du bassin lémanique, qui est pour lui une très bonne pomme. Mario évoque la pomme comme point de départ de l’univers et le jardin d’Eden, épisode religieux qui permet selon lui une ouverture sur la notion d’évolution. 00:09:47 – 00:11:00 (Séquence 9) : Les années 1930 ont été pour Mario Baggiolini des années de grande incertitude en lien avec la crise économique, les difficultés financières mais aussi la montée du fascisme qui ne correspondait pas à ses valeurs familiales et personnelles. Comme sa famille était suisse et engagée dans l’action catholique, on se méfiait d’eux et on les surveillait. Mario se souvient qu’une nuit leur maison a été encerclée et qu’il s’est réveillé avec un revolver sous le nez parce qu’une rumeur circulait qui voulait qu’une bombe se fabrique dans la maison. Mario explique que son frère, qui était technicien, travaillait avec différents appareils mais ne fabriquait pas de bombes. C’est un souvenir pénible de cette époque qui est contrebalancé par d’autres plus heureux comme ses fiançailles en 1935 et son mariage en 1939. 00:11:04 – 00:13:27 (Séquence 10) : Mario Baggiolini n’avait pas fait son école de recrue, il n’a donc pas été inquiété au moment de l’éclatement de la deuxième guerre mondiale en 1939, année au cours de laquelle il s’est marié. Il a pu rester dans son domaine avec sa famille mais dans un climat tendu d’années de guerre en Italie. Mario Baggiolini raconte un épisode presque tragique. Il explique que leur maison, à cause de sa situation géographique proche de la frontière avec la Suisse, était devenue progressivement un repère de prisonniers alliés qui fuyaient et de juifs, que Mario et sa famille aidaient avec enthousiasme mais pas assez de prudence. Les forces fascistes ont lancé un coup de filet dans la région et Mario était sur la liste des recherchés. Une voisine le lui a appris au dernier moment et il n’a eu d’autre choix que de s’enfuir en Suisse, laissant derrière lui sa mère, sa femme et ses deux jeunes enfants. Mario Baggiolini est donc rentré dans sa patrie, la Suisse, en 1943 en suivant le chemin des contrebandiers. Mario raconte sa fuite : une fois alerté il a dit au revoir à sa famille, est parti à bicyclette à Luino, puis est monté chez un vieil ami curé qu’il savait être dans le coup pour ce type d’opération de sauvetage. Ce curé a appelé une femme qui a conduit Mario à une centaine de mètres de la frontière suisse. Mario a ensuite fait le dernier tronçon au pas de course et en se méfiant des éventuels gardes pour se retrouver en Suisse devant le fusil d’un soldat suisse à qui il a présenté son passeport suisse. 00:13:32 – 00:14:34 (Séquence 11) : Arrivé en 1943 au Tessin, à Bellizone, Mario Baggiolini a été très bien accueilli par ses oncles. Il a dû par contre payer le prix de son sauvetage à sa patrie car il a été appelé et a fait de nombreux mois de service militaire où il était chargé de surveiller l’espace aérien. Après cela, il a fait quelques dessins pour des cours du service cantonal de l’arboriculture. Ses dessins ont été appréciés et lui ont ouvert les portes du service qui l’a engagé au moment où un nouveau ravageur faisait son entrée en Suisse et nécessitait des mesures obligatoires de contrôle et de lutte. 00:14:39 – 00:15:30 (Séquence 12) : Mario Baggiolini parle d’un événement de l’histoire récente de la nature en Europe, l’arrivée du pou de San José. Cet événement est aussi celui qui lui a permis de s’intéresser à l’entomologie, au beau monde des insectes. Mario travaillait au service de l’arboriculture du Tessin, mais son travail était supervisé par le Service de l’entomologie à Lausanne qui avait la responsabilité des recherches sur cet insecte au niveau national. Mario explique que c’est de cette façon qu’il a été repéré par les entomologistes de la station de Lausanne et que quelques années plus tard il est parti travailler à Lausanne. 00:15:36 – 00:16:52 (Séquence 13) : Mario Baggiolini parle de l’utilisation généralisée du DDT. L’apparition de ce produit dans les années 1940 représentait un véritable espoir, de même que les hexa et les premiers produits phosphoriques. On pensait avoir les moyens de faire face à tous les problèmes. Mario Baggiolini se souvient qu’en 1944, alors qu’il travaillait au service de l’arboriculture, il avait été un véritable apôtre du DDT dans une exposition à Bellinzone. Ce rêve de progrès a tout de même engendré les grandes plantations de pêchers dans les plaines de Magadino et les gran