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Celotno besedilo
  • Jean Mayerat

    12/1987
    Video Recording

    Etre sculpteur, c'est être patient, très patient même. L'œoeuvre se conquiert de haute lutte, dans le temps. Réflexion, absence de précipitation dans le propos, équilibre de la parole, simplicité et rigueur marquent le discours d'André Ramseyer. Elève de Zadkine, de Moore et de Jean Arp, c'est grâce à ces maîtres que le jeune sculpteur trouvera sa propre voie. Se laisser guider par la matière, lui faire confiance dans sa capacité de conduire notre main, "être humble en face d'elle", telles sont quelques-–unes des attitudes qui fondent la démarche de l'artiste dans la lente conquête des formes, des vides et des lignes. 00:00:00 – 00:00:24 (Séquence 0) : Générique de début du Plans-Fixes consacré à André Ramseyer, sculpteur, et tourné à Neuchâtel le 8 décembre 1987. L'interlocuteur est Bertil Galland. 00:00:24 – 00:01:07 (Séquence 1) : André Ramseyer explique sa perception de la matière qu'il doit travailler, sculpter. Il dit avoir un grand respect pour elle, parce qu'elle est vivante. 00:01:08 – 00:02:49 (Séquence 2) : André Ramseyer explique sa position face à la matière qu'il doit travailler, sculpter. Selon lui, il y a deux manières d'attaquer un bloc de pierre. La façon habituelle: il s'agit de reporter, d'après une maquette en plâtre, les points à l'aide d'une espèce de pantographe. La deuxième, et c'est celle qu'il honore, consiste à se lier d'amitié avec la matière, à l'écouter et se montrer humble devant elle. C'est en collaboration avec la matière et sans avoir de formes préétablies qu'il pratique la sculpture. Une démarche qu'il considère plus passionnante, même si elle est plus risquée. 00:02:50 – 00:03:47 (Séquence 3) : André Ramseyer parle de son œuvre intitulée "Le Fruit" de 1950. Il explique l'origine de cette sculpture. L'ingénieur communal de Neuchâtel lui avait signalé une borne qui allait disparaître, non loin de chez lui, faite dans une très belle pierre d'Hauterive. En essayant de lui enlever le moins de matière possible, il y a sculpté un personnage couché dans lequel il est encore possible de lire la forme de la borne. 00:03:48 – 00:04:30 (Séquence 4) : André Ramseyer raconte sa vie dans les années 1950. Une période difficile, durant laquelle il était tiraillé entre l'art figuratif et non-figuratif. Le passage d'un style à l'autre s'est fait très lentement, sur plusieurs années. Il dit ne pas vouloir forcer les choses, il essaie d'être un "esprit obéissant", de se laisser guider et conduire. Il aime produire une œuvre seulement si au plus profond de lui l'envie se manifeste. 00:04:31 – 00:04:59 (Séquence 5) : André Ramseyer parle à nouveau de la sculpture "Le Fruit". Il explique qu'elle répond en quelque sorte à une nécessité imposée par la matière. La borne obligeait le choix de certaines formes plutôt que d'autres. Cette oeuvre montre déjà une certaine liberté dans la reproduction du corps humain. 00:05:01 – 00:05:43 (Séquence 6) : André Ramseyer raconte l'origine de son respect pour la matière, pour la pierre. Il dit avoir eu déjà dans son enfance des contacts avec la nature qui l'ont émerveillé. Certains adultes l'ont ouvert à la beauté de la nature, d'un arbre, d'une feuille, d'un caillou. Il pense que grâce à ces expériences, sa sensibilité s'est petit à petit affinée, aiguisée. Son respect pour la nature, pour la matière, a grandi avec les années. 00:05:45 – 00:06:42 (Séquence 7) : André Ramseyer évoque son enfance et sa famille. Son père était pasteur. Il est né à Tramelan au presbytère. Dans sa famille, les goûts artistiques étaient surtout prononcés pour la musique. Son père jouait du violon, ses frères du piano et lui-même de la flûte. Ils jouaient de la musique de chambre tous ensemble le dimanche après-midi. Son père l'a initié au respect de la musique, à l'écouter plus qu’à l'entendre. 00:06:45 – 00:07:37 (Séquence 8) : André Ramseyer parle de son enfance, de ses premières années passées à Tramelan, lieu qu'il a quitté à ses neuf ans. Il est né en 1914 et ses premiers souvenirs sont marqués par la mobilisation de l'armée pendant la première guerre mondiale, de 1914 à 1918. Il se rappelle les échanges amicaux qu'il avait avec des soldats dans le verger de la cure. 00:07:40 – 00:08:15 (Séquence 9) : André Ramseyer parle de son enfance. À neuf ans, lui et sa famille quittent le village de Tramelan. Son père avait été nommé pasteur à Sonvilier, près de La Chaux-de-Fonds, dans la vallée de Saint-Imier dans le Jura bernois. Son frère allait à l'école secondaire à La Chaux-de-Fonds, et ses parents désiraient alors se rapprocher de la ville pour permettre à leurs enfants de fréquenter le gymnase. Avec son frère, ils ont fait tous les jours les trajets en train depuis Sonvilier pour aller à l'école. 00:08:18 – 00:09:03 (Séquence 10) : André Ramseyer évoque la ville de La Chaux-de-Fonds. Une ville qu'il trouve exceptionnelle. Elle est composée par des clans, des mouvements, des passions qui s'affrontent. Il y a un goût de l'art, des beaux-arts et de la musique qui sont très prononcés. Autour de certains personnages se formaient des grappes d'artistes en devenir. Il cite l'exemple de L'Eplattenier, Le Corbusier, Perrin, Schwob, Humbert, Madeleine Woog. 00:09:07 – 00:10:25 (Séquence 11) : André Ramseyer parle des gens qui, comme lui, se sont formés à La Chaux-de-Fonds autour de Léon Perrin. Perrin était sculpteur, grand ami de Le Corbusier. Ramseyer a rencontré Perrin à l'école normale où le sculpteur enseignait. Perrin a apporté à l'enseignement du dessin quelque chose de nouveau, de révolutionnaire et de passionnant. Il avait rompu avec certains procédés ennuyeux. Il avait surtout une capacité à enthousiasmer les jeunes. Son seul défaut était peut-être de ne pas les ouvrir à l'art contemporain. Néanmoins il transmettait un important goût de l'art et un souffle de liberté. Ceci l'a beaucoup marqué à l'époque. 00:10:30 – 00:11:14 (Séquence 12) : André Ramseyer explique comment il a été initié à la sculpture. C'est grâce à l'enseignement de Léon Perrin à l’école normale de La Chaux-de-Fonds. Perrin enseignait aussi à l'école d'art, où André Ramseyer a pu suivre des cours de modelage. Il s'est lié d'amitié avec lui et, suite à sa proposition, il est allé travailler dans son atelier. C'est là qu'il a appris à tailler la pierre. Il se souvient en particulier d'un travail sur un bloc de Saint-Triphon qu'il a dû mettre à plat. Sa collaboration dans l'atelier a duré de nombreuses années. 00:11:19 – 00:12:58 (Séquence 13) : André Ramseyer parle du travail de sculpteur, en particulier de la technique de la taille. Une activité qui exalte et qui met à l'épreuve à la fois. Aussi, elle enseigne la patience. Il cite son maître Léon Perrin qui insistait sur l'importance de la patience et affirmait que, sans elle, il valait mieux abandonner la sculpture. La patience n'est toutefois pas la différence entre la sculpture et les autres arts, qui en nécessitent aussi. Mais le travail du peintre lui paraît plus direct, alors que le sculpteur doit passer par une série d'étapes. Le travail peut durer des jours, des semaines, voire des mois. C'est une approche de l'art très différente. Il ne veut pas par son discours créer de hiérarchies dans les différentes pratique artistiques. S'il était néanmoins obligé de le faire, il mettrait l'architecture en première place. 00:13:04 – 00:14:03 (Séquence 14) : André Ramseyer parle de son rapport à l'architecture. Sa découverte de l'architecture se fait véritablement lors d'un voyage en Italie. En Toscane, Ombrie et Vénétie, il découvre l'art et l'architecture italiens de la Renaissance. À Florence, pendant plusieurs semaines, il dessine uniquement de l'architecture. Attiré par sa beauté, il essaie de déceler les proportions, les échelles des bâtiments. Il pense qu'en alternative à la sculpture, il aurait choisi l'architecture. 00:14:09 – 00:15:33 (Séquence 15) : André Ramseyer cherche à définir les œuvres d'art, en sculpture et dans les autres disciplines artistiques. Elles sont formées de plusieurs éléments, souvent indicibles. Il estime qu'une œuvre d'art, au-delà des techniques utilisées pour sa fabrication et de son extérieur, doit être habitée, avoir une âme. Elle doit avoir une sorte de noyau intérieur, de quatrième dimension. C'est l'essentiel de l'oeuvre. Le noyau, l'âme de l'œuvre donnée par l'artiste rayonne, produit des vibrations auxquelles le spectateur est plus ou moins sensible. C'est la dimension spirituelle de l'œuvre, et celle-ci en détermine la validité. 00:15:40 – 00:17:11 (Séquence 16) : André Ramseyer explique les notions d'élévation et d'enracinement dans la sculpture. Il discerne dans la sculpture une série d'œuvres qui ont un poids, qui sont ancrées au sol, qui exercent une sorte de pression et d’autres qui semblent vouloir décoller, qui nous donnent envie d’être mise dans l'espace, de supprimer leurs socles pourtant nécessaires. Ces dernières poussent à la verticale. Il ne s'agit pas forcément d'élévation spirituelle, les sculptures d'enracinement sont aussi pleines de richesses. Il donne l’exemple du sculpteur suisse Luginbühl, dont les œuvres sont fortement ancrées au sol. 00:17:18 – 00:18:02 (Séquence 17) : André Ramseyer parle des influences artistiques qu’il a connues à La Chaux-de-Fonds. Il dit que l'artiste de référence, surtout pour la sculpture figurative, était indiscutablement Rodin, Bourdelle aussi. Son maître Léon Perrin avait les mêmes références. Lorsque Ramseyer a vécu à Paris, il est allé de nombreuses fois au Musée Rodin, dont il a fini par connaître les œuvres par cœur. 00:18:10 – 00:19:24 (Séquence 18) : André Ramseyer raconte ses débuts de sculpteur à La Chaux-de-Fonds. Une période économiquement difficile. Comme il avait fait l'école normale, il a pu faire des remplacements. Entre enseignement et confection de monuments funéraires, il a pu gagner sa vie. Le travail sur les monuments funéraires présentait une certaine liberté et lui a permis de pratiquer la sculpture. Léon Perrin lui-même avait fait des monuments funéraire